Immobilier tertiaire : les défis de la reconversion des bureaux vacants

Tout propriétaire se pose des questions et celles-ci sont souvent similaires ! D’autant plus lorsque le bien en question a perdu en attractivité en raison d’une localisation médiocre :
> Vers quel usage convertir mon immeuble (hôtel, logement, autre) ?
> La transformation que j’envisage est-elle techniquement réalisable (structure, profondeur des plateaux, compatibilité avec le Plan Local d’Urbanisme (PLU) ?
> Quel sera le coût des travaux ?
> Faut-il revendre le projet pour limiter les pertes ou le transformer et le conserver dans mon patrimoine ?
Bureaux vacants – Quel constat ?
Le diagnostic est partagé par l’ensemble des professionnels du secteur : plus de 9 millions de mètres carrés d’immobilier tertiaire sont vides en France. Plusieurs raisons expliquent l’augmentation de ce parc d’immeubles vacants :
· La désaffection de certains bureaux suite à la pandémie de Covid-19
· son corollaire : l’explosion du télétravail
· la volonté des entreprises d’optimiser leurs parcs immobiliers
· les faillites et restructurations d'entreprises
· l'obsolescence des bâtiments
· les zones dites en déclin économique
· l’environnement financier (taux et inflation) plus favorable au résidentiel
Le résultat est sans appel : le nombre de plateaux de bureaux sans repreneurs se multiplie.
Et vous dans tout ça ? Quelles options s’offrent à vous ?
Face à cet accroissement de la vacance, le propriétaire d’un actif immobilier est pris dans un cercle vicieux : pertes de revenus locatifs, charges fixes à assumer (impôts, assurances, entretien, sécurité) et dépréciation de son patrimoine. Une action rapide est donc impérative. Vous trouverez ci-après nos conseils relatifs à la transformation de vos biens dans le contexte actuel du marché ainsi que les éléments clés à prendre en compte avant d’entreprendre toute démarche.
Changement d'usage de mon bien et prise en compte del'évolution de la réglementation
La transformation de bureaux en logements est un processus très réglementé (art. R. 421-14 et R. 421-17 du Code de l’urbanisme).Il est crucial de se renseigner sur les règles d'urbanisme applicables et de vous référer au PLU de la commune avant de démarrer tout projet. Exemple : une autorisation de Permis de Construire est exigée lorsque les travaux modifient la structure du bâtiment, voire sa façade, et une Déclaration Préalable est requise lorsque la destination des locaux change, indépendamment de toute modification.
Vers une exigence écologique nécessaire
Aujourd’hui, le Décret tertiaire génère des sanctions financières en cas de non-respect des normes environnementales.
Il convient, néanmoins, de noter une évolution de la part des pouvoirs publics pour favoriser les conversions d’usage. La loi Elan de 2018 permet d’utiliser plusieurs dispositifs comme un bonus de constructibilité de 30 % ainsi que des dérogations aux obligations de mixité sociale pour faciliter les transformations. L’un des objectifs pour favoriser ce type de transformation est aussi de réduire l’artificialisation des sols.
De plus, la loi « Climat et Résilience », votée en2021, impose aux maîtres d’ouvrage de tout bâtiment à construire ou à démolir, la réalisation d’une étude du potentiel de changement de destination et d’évolution du bâtiment. Un expert commente : « La flexibilité d’un espace est au cœur de tout ». C’est l’idée reprise par le Permis de Construire réversible dont l’objectif est de d’ouvrir la possibilité de créer des immeubles réversibles sans nécessiter une nouvelle autorisation d’urbanisme.
Quelques exemples emblématiques de transformation à Paris
Dans cet esprit, la 3e édition de l’appel à projet « Réinventer Paris » a sélectionné plusieurs sites pouvant bénéficier d’une transformation encadrée suivant les principes énoncées ci-dessus :
· le siège de l’APHP, avenue Victoria, sur 25 000 m²
· un ancien centre de distribution électrique, rue d’Aboukir sur 5 000 m²
· des locaux d’enseignement supérieur, rue des Bernardins, sur 900 m²
· un garage Citroën, avenue de la République, sur 6 500 m²
· un garage Renault, quai de Grenelle, sur 10 500 m²
· l’ancien magasin Tati à Barbès, Boulevard de Rochechouart, sur 6 500 m²
Ces projets témoignent d’une évolution significative :la reconversion de sites urbains est aujourd’hui d’actualité. Longtemps considérée comme une niche, la reconversion est aujourd’hui une tendance dominante dans l’aménagement urbain.
Convertir votre immeuble, oui ! Mais vers quel usage (hôtel, logement, autre) ?
De nombreux investisseurs se posent la question de la transformation des actifs de leur patrimoine. Toutefois, il n’est pas aisé de saisir les opportunités de conversion d’usage et lorsqu’elles se présentent leur faisabilité technique et financière reste un grand défi.
Aujourd’hui, on note un retour en force des investisseurs institutionnels dans le logement. La principale raison est que l’immobilier résidentiel est considéré comme un investissement plus stable et plus sûr. Ces investisseurs privilégient les opérations "value-add", qui consistent à transformer des biens immobiliers dans le but d’augmenter leur valeur.
Si la solution de transformation en logement d’un immeuble vacant est la plus commune, d’autres investisseurs optent pour transformer leur actif en :
· data denters,
· résidences étudiantes ou seniors,
· établissements hôteliers,
· équipements de loisirs.
Ces choix impliquent une réflexion sur la mutation de certains quartiers et la création d’attractivités nouvelles. En effet, un immeuble de logement exige souvent, à proximité, la création de commerces, d’écoles, etc.
La transformation de votre bien est-elle techniquement réalisable ?
En premier lieu, il convient de s’intéresser à la faisabilité technique de ladite transformation. Un bureau d’études se charge alors d’un diagnostic structurel afin de vérifier les capacités du bâtiment, d’en révéler les éventuelles difficultés majeures liées à l’amiante ou au plomb. Ensuite, l’analyse des experts porte également sur les plateaux (profondeur, hauteur) pour mesurer leur compatibilité avec la nouvelle configuration. Enfin, une attention spéciale est portée aux réseaux, systèmes de ventilations, isolations thermique et acoustique.
La deuxième étape consiste à vérifier la compatibilité de la transformation avec le PLU : hauteurs, reculs, stationnements et espaces verts.
Enfin, des analyses complémentaires telles qu’une étude de marché associée à d’autres études financières viennent affiner et parachever l’évaluation et la viabilité de votre projet de transformation et déterminer sa faisabilité technique.
Quels coûts envisager pour les travaux ?
Évaluer le coût des travaux de transformation de bureaux en logements exige une approche rigoureuse, débutant par un diagnostic technique complet pour identifier les besoins de rénovation. Cela implique donc d’effectuer :
· un diagnostic initial et des études préalables,
· des études de faisabilité,
· une définition claire et précise du projet et des prestations annexes,
· des plans et descriptifs,
· un cahier des charges,
· une consultation des entreprises et obtention des devis,
· une estimation des coûts annexes.
Le suivi attentif du chantier et le contrôle régulier des dépenses sont essentiels pour respecter le budget. Les coûts varient selon la complexité du projet, les matériaux et la localisation. Faire appel à des professionnels expérimentés est fortement recommandé pour une estimation fiable et un déroulement optimal de vos travaux.
Faut-il revendre le projet pour limiter les pertes ou le transformer et le conserver en patrimoine ?
Cas d’étude.
Un investisseur acquiert un immeuble de bureaux"Alpha" dans une zone urbaine en développement. L'objectif initial est de transformer cet immeuble en logements.
Lors des premiers diagnostics, l’investisseur se rend compte que la structure du bâtiment a des faiblesses, notamment concernant la profondeur des plateaux. Celle-ci ne correspondant pas aux standards convenus, des travaux complexes et coûteux sont donc à envisager. Il s’aperçoit également que des modifications du PLU sont annoncées, limitant la densité de logements autorisée dans la zone.
Prudent, l’investisseur décide alors de revendre le projet. Les coûts de rénovation imprévus et les contraintes réglementaires compromettent la rentabilité du projet. Grâce à la revente, il pourra récupérer une partie de l'investissement initial et éviter d’autres pertes plus importantes.
Ce cas de figure se présente lorsque l’analyse pointe :
· des obstacles techniques et réglementaires insurmontables,
· une détérioration de la conjoncture économique,
· des problèmes de financement et des difficultés à obtenir des capitaux.
Les bureaux et les logements sont des actifs différents, tant sur le plan de la réglementation que sur le plan technique. Les conséquences financières imputées à une commune varient également en fonction de la nature d’un bien.
Si l’idée de « reconstruire la ville sur la ville »séduit massivement, l’effort à fournir, lui, reste gigantesque. Aujourd’hui, seuls2 % des logements neufs proviennent d’une transformation. Si l’évolution de la législation tend à favoriser de plus en plus les opérations de transformation, les mentalités des élus comme des professionnels de l’immobilier, quant à elles, doivent suivre.